La Société
de Nourrissement de l'Océan (Ocean Nourishment Corporation) prépare
une expérience imminente d'épandage d'urée dans
les mers d'Asie du sud-est
Source: Etc group
http://www.etcgroup.org/en/materials/publications.html?pub_id=660
5 novembre 2007
Des groupes de sociétés civiles demandent à la
Convention de Londres de stopper les expériences de géoingénierie
de largages marins
Préparé par ETC Group (Canada), SEARICE (Philippines),
Third World Network (Malaisie), Corporate Watch (Royaume Uni)
Aperçu:
Des organisations civiles internationales ont révélé
aujourd'hui qu'une compagnie privée de géoingénierie
avait reçu récemment le feu vert officiel pour rejeter
500 tonnes d'urée dans la mer de Sulu près des Philippines
pour une expérience à grande échelle de "séquestration
de carbone" sans une Estimation sur l'Impact Environnemental. Le
rejet expérimental d'urée pourrait avoir lieu cette année
(2007). D'après des articles de presse, un rejet supplémentaire
de 1000 tonnes d'urée est prévu dans les eaux de Malaisie
en 2008 et la société considère aussi des sites
océaniques additionnels près des Émirats Arabes
Unis, du Chili et peut être du Maroc.
Les groupes de sociétés civiles internationales sont
inquiets que ces activités commerciales puissent menacer les
revenus des pêcheurs et poser des risques écologiques inacceptables.
Ils demandent que la 29° réunion consultative de la Convention
de Londres et que la 2° réunion des parties contractantes
du Protocole de Londres (5-9 novembre 2007) considèrent la menace
des projets d'addition d'azote à grande échelle comme
partie des discussions planifiées de la Convention sur les projets
d'épandage de fer.
Basé sur le manque actuel de connaissances scientifiques et
l'absence de régulation intergouvernementale, la coalition des
sociétés civiles recommande un moratoire sur les expériences
de géoingénierie commerciales ou à grande échelle.
La géoingénierie désigne la manipulation intentionnelle
à grande échelle des terres, des mers et de la stratosphère
par l'homme pour provoquer un changement environnemental.
Qui:
La Société de Nourrissement de l'Océan (SNO) est
une société privée issue du Groupe de Technologie
des Océans de l'Université de Sydney. La société
veut gagner des crédits de carbone et également des revenus
de la production de poissons en licenciant sa technologie pour provoquer
la multiplication du plancton dans de grandes parties de l'océan
pélagique. Cette technologie implique le rejet d'urée
en granulés par milliers de tonnes dans les mers. Le président
de SNO est le technologue océanique Ian Jones de l'Université
de Sydney. Il dirige également la Société de Nourrissement
Sulu et la Fondation de Nourrissement de l'Océan. Toutes les
deux détiennent des brevets sur leurs techniques de géoingénierie
de "nourrissement de l'océan".
La technologie et ses ambitions:
SNO propose de pomper de l'eau riche en azote dans des parties d'océan
pour stimuler la multiplication des algues. L'ingrédient principal
est de l'urée en granulés solubles produite à partir
d'usines fixes ou flottantes. L'urée est produite à partir
d'ammoniaque (NH3) et de dioxyde de carbone (CO2), les deux pouvant
être obtenus à partir de gaz naturel. L'urée serait
ensuite dissoute dans l'eau de mer, pompée dans un tuyau sur
le fond de la mer et relâchée dans des zones "infertiles"
de l'océan au bord de la plaque continentale. La solution d'urée
serait relâchée 50 mètres sous la surface de l'océan
dans la couche ensoleillée où les niveaux augmentés
d'azote stimuleraient la croissance du phytoplancton. SNO affirme que
ça aurait deux effets:
1- Puisque le phytoplancton est la base de la chaîne alimentaire
aquatique, une augmentation du plancton pourrait apporter une augmentation
du stock de poissons. SNO prétend que chaque tonne d'urée
ajoutée à l'océan résultera en une tonne
de poisson supplémentaire. Ils comparent ce modèle d'ajout
d'azote dans la mer à l'impact des engrais sur l'agriculture.
"Nous transformons la terre pour fournir de la nourriture aux gens.
C'est comme pratiquer l'agriculture dans la mer", dit Ian Jones.
Ian Jones prétend avoir des droits (sans doute avec ses brevets)
sur toute protéine océanique générée
avec cette méthode.
2- Le phytoplancton absorbe le CO2 de l'eau de mer par photosynthèse.
Le CO2 reste dans les tissus du plancton et des poissons. Quand ils
meurent, certains tombent au fond de l'océan et peuvent entraîner
le CO2 de l'atmosphère. "Nous soutenons que si on créé
du carbone organique, tout ce carbone est finalement emporté
au fond de l'océan" dit Ian Jones. SNO a l'intention d'utiliser
sa technologie comme puits de carbone et a dit à la presse qu'elle
espère prendre part aux transactions de carbone en 2008 en posant
sa candidature à une Procédure de Développement
Propre pour la Réduction des Émissions Certifiée
selon le protocole de Kyoto. La société prétend
qu'une tonne d'azote (urée) pourrait séquestrer 12 tonnes
de CO2. Elle affirme que chaque usine de rejet d'urée pourrait
maintenir une zone de 20 Km de plancton à une densité
de 200 microgrammes par litre et séquestrerait 8 millions de
tonnes de CO2 par an pour un coût de 10 à 15 dollars par
tonne.
Où et quand?
SNO a déjà approché des gouvernements au Chili
et aux Émirats Arabes Unis comme base potentielle de test pour
sa technologie. SNO a dit au New Scientist que plus tard dans l'année
(2007) elle prévoyait de conduire ses premiers essais à
grande échelle sur le terrain, relâchant 500 tonnes d'urée
dissoute au large des côtes des Philippines. Cela sera suivi par
un essai impliquant 1000 tonnes d'urée dissoute au large de la
Malaisie.
Les groupes de sociétés civiles croient qu'une agence
du gouvernement philippin, le Bureau de la Pêche et des Ressources
Aquatiques, a reçu une demande d'une université d'état
pour un "projet de séquestration de carbone" dans les
eaux philippines, en partenariat avec une "université australienne"
plus tard dans l'année. Le Bureau de la Pêche et des Ressources
Aquatiques a reçu la demande de permis en septembre et aurait
déjà donné le feu vert pour le projet. Il semble
qu'une Estimation sur l'Impact Environnemental n'a pas été
effectuée. Ni qu'il y ait eu de plus larges consultations avec
les pêcheurs, les communautés côtières ou
des sociétés civiles aux Philippines ou ailleurs.
Nous pensons que l'"université australienne" est en
fait SNO (par l'intermédiaire de l'Université de Sydney)
et que l'Université de San Carlos (une université privée
située à Cebu City, dans les Philippines centrales, qui
a une longue habitude des activités de bioprospection marine
avec des entités étrangères dans les eaux des Philippines
centrales) et l'Université des Philippines des Visayas (une grande
université d'état spécialisée en recherche
marine) sont impliquées de la même manière au niveau
local. Nous croyons aussi que SNO prévoit probablement de relâcher
de l'urée dans la Mer de Sulu afin de tester sa technologie brevetée.
En décembre 2007, Ian Jones assistera à la réunion
de l'Union Géophysique États-unienne à San Fransisco
où il présentera ses découvertes initiales sur
les effets de l'urée sur des échantillons en bouteille
pris dans la mer Sulu, la mer de Tasmanie et aussi vers les côtes
du Maroc.
Inquiétudes:
Les inquiétudes des société civiles sur le rejet
d'urée sont similaires à celles apportées par la
fertilisation de l'océan par le fer, bien que les quantités
d'urée soient supérieures. La pollution par l'urée
et les fertilisants azotés causée par le ruissellement
a été liée à la multiplication d'algues
toxiques dans la littérature scientifique et soulève la
possibilité de zones mortes par manque d'oxygène. En juin
2007, des conseillers scientifiques de la Convention de Londres ont
montré de plus grandes préoccupations au sujet des impacts
potentiels de la multiplication artificielle d'algues à grande
échelle sur les écosystèmes marins (les inquiétudes
ont été soulevées en réponse aux projets
de sociétés commerciales comme Planktos et Climos de fertiliser
les océans avec du fer contre des crédits de carbone).
Nous croyons que les mêmes préoccupations s'appliquent
aux projets de fertilisation par l'urée de SNO.
SNO reconnaît les risques écologiques associés
à l'addition d'urée. Cependant, elle prétend que
sa technologie est contrôlable. La société soutient
qu'en utilisant des images satellites les concentrations de plancton
pourraient être surveillées et les niveaux d'urée
ajustés pour empêcher la multiplication dangereuse d'algues.
Nous sommes profondément sceptiques sur ces affirmations. |